mercredi 21 mai 2008

Cannes : les films

Trois jours à Cannes sont donc trois jours de folie mais surtout trois jours de boulimie cinéphile intense. Même pour une droguée de la télé habituée à manger de l'image toute la journée ça parfois été dur. Heureusement que j'ai vu de belles choses, des choses prise de tête, des trucs qui détendent et d'autres qui émeuvent. Bref un peu de tout et pas de risque de se lasser.

Dans la catégorie film que j'ai vu sans trop me fatiguer je peux en mettre trois. Le documentaire sur Mike Tyson, présenté dans la section Un Certain Regard, 1h30 d'interview entrecoupée de quelques extraits de matchs, d'images du jeune boxer dans les années 70 et des grands moment télévisuels de la carrière d'Iron Mike. Malgré l'aspect un peu trop point de vue unique du docu, c'était très sympa à voir. Tyson a une façon unique de parler de son passé, sans en faire des tonnes, sans surjouer l'émotion. Il semble se souvenir de chaque moment important de sa vie comme s'il venait d'arriver et il le dit  vraiment bien. Il zozote légèrement ce qui donne un aspect encore plus sympathique à son histoire et même si l'on sait bien que tout n'est peut être pas vrai on se laisse guider par ce gros nounours dans le monde fou de la boxe. Dans la même catégorie j'ai vu Tokyo !, un ensemble de trois moyens métrages réalisés par Gondry, Carax et Bong Joon Ho. Le principe est simple, ça doit se passer à Tokyo et ça doit être loufoque. Celui de Gondry parle d'une femme qui se transforme en meuble quand elle se sent abandonnée ( Interior Design ), celui de Carax ( Merde ) raconte l'histoire d'une sorte de Grinchqui sort des égoûts pour terroriser périodiquement la ville et qui parle une langue que seules trois personnes sur Terre parlent dont un Jean-François Balmer truculent. Le dernier ( Shaking Tokyo ) est celui que j'ai le plus aimé et raconte comment l'amour va faire sortir un ado attardé de son ermitage grâce à une livreuse de pizza. Malgré une symbolique parfois lourde j'ai été très touché par ce film, sa poésie simple et sa photo incroyable. Chaque vu était d'une précision délicate, chaque image construite avec beaucoup de soin et parfois d'humour. La présentation de l'appartement de l'ermite tokyoïte est surprenante, avec ces vues de boîtes de pizza, de rouleaux de PQ, de livres ou de boîtes de conserves patiemment empilées. Une oeuvre pétillante, délicate, juste ce qu'il ya des sérieux et de surréalisme.

Le dernier des trois films qui ne m'a coûté aucun effort à voir et qui m'as mis d'excellente humeur est Kung-Fu Panda. Bon je sais que certains peuvent mépriser le fait d'adorer toujours ce genre de film mais je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas y voir autant de poésie que dans un film plus sérieux. Alors autant les derniers Dreamworks m'avait franchement déçus depuis le très insipide Madagascar autant j'ai retrouvé dans ce film une vraie veine comique, un humour qui ne table pas que sur les références culturelles mais qui joue avec le burlesque et les codes même du film de kung-fu. Le panda est bidonnant et l'histoire pas si prévisible que je ne le pensais ( mais bon quand même à la fin les gentils gagnent faut pas abuser ), la leçon de morale pour les tout petit est moins appuyée et lourde que je m'y attendais. Le graphisme est vraiment très chouette, on lorgne du côté de l'animation asiatique et des paysages énigmatiques, l'animation est ultra fluide, c'est vraiment un travail soigné, dans le fond comme dans la forme. Un bon cocktail pop, qui se déguste sans modération. A voir en VO pour la kyrielle de stars : Jack Black, Dustin Hoffman, Angelina Jolie, Lucy Liu, les voix sont impeccables. J'en ai des choses à dire sur des films pour enfants !

J'ai aussi vu les courts-métrages de la Quinzaine de la Critique ( enfin je crois que c'était la Critique ). Du bon et du bon moins bon ( pour le moins bon rien à dire je me suis endormie devant les 12 minutes de ce film immobile et soporifique sur fond vert ). Pour le meilleur j'en retiens deux : Next Floor de Denis Villeneuve est un film très noir sur un repas de goinfres totalitaires qui finissent dans la poussière de la cave et surtout il y a Skhizein de Clapin. Pas de surprise c'est de l'animation. L'histoire d'un type qui reçoit une météorite sur la tête et qui se retrouve à 91 cm à côté de son corps. Simple, loufoque, efficace et d'un graphisme très sympa, volontairement lisse très stylisé. J'adore. Sur l'image, le gars à la météorite est en fait dans le vide de l'autre côté du mur mais son coprs est bien sur le sofa. Clair ??

Le film que j'ai le plus détesté, celui qui m'a néanmoins permis de faire une bonne sieste méritée est De la Guerre avec Mathieu Amalric. Sur un mec qui quitte tout pour se retrouver dans une grande maison isolée, entre secte et thérapie de groupe. A part le fait de voir de nouveau Guillaume Depardieu pas grand chose à dire. Long, parfois hermétique et trop prise de tête. 

A l'inverse, un que je n'avais pas compté voir et qui m'a finalement enchanté est Tokyo Sonata. Je sais ça fait beaucoup de Tokyo mais ce n'est pas ma faute si le cinéma japonais est plus attirant que celui d'Europe de l'Est. Présenté dans la section Un Certain Regard le film raconte les errances des membres d'une famille japonaise lambda, au milieu d'une société qui ne sait plus qui elle est et d'un pays qui se cherche une nouvelle place. Le sujet peu sembler austère dit comme ça mais le film est une vraie bonne surprise, alternant moments insolites et scènes plus dures, mais gardant toujours beaucoup de lyrisme et de tendresse pour ses jolis paumés. En plus le film était présenté par le réalisateur et son équipe qui étaient apparemment émus d'être à Cannes, super souvenir.

Venons-en maintenant à la sélection officielle. Distribués au compte-goutte, on ne peut en voir qu'un ou deux par jour. en trois jours j'en ai vu quatre. Celui devant lequel j'ai le plus dormi est 24 city de Jia Zhangke qui avait déjà réalisé Still Life. Comme tous les films asiatiques que j'ai vu à Cannes la photo était incroyable, pure, fine, sensible mais je n'ai pas du tout accroché à la forme trop plate du pseudo-documentaire. Mais le film est très instructif sur l'industrie chinoise et la vie derrière le miracle économique, c'est déjà ça. J'ai également vu Trois Singes en séance officielle et le film m'a bien plus, racontant le déchirement d'une famille déséquilibrée d'une manière lente, presque élégiaque. C'est violent, c'est âpre et ça suit un rythme vraiment particulier. Mais ce que je retiens surtout de cette séance c'est les marches montées, la salles principale du palais, toute cette soirée excitante dont j'ai déjà parlé. Je ne pense pas que ces films soient en mesure de gagner la palme mais bien sûr je peux me tromper.
J'ai aussi vu le Conte de Noël de Desplechin qui malgré toutes les critiques béates me semble un peu trop littéraire et français pour gagner la palme mais pourquoi pas. Je l'ai déjà dit mais j'ai été soufflée par l'interprétation de ce film, des comédiens incroyables qui touchent à tous les registres, qui se répondent et se complètent très bien et dont les voix m'ont définitivement charmées. Mention spéciale à miss Mastroianni et à miss Devos qui jouent des femmes incroyablement vives, affirmées, surprenantes, de celles qu'on a envie de suivre et d'aimer même quand la lumière du cinéma se rallume.

Le film qui pour moi mérite le plus de remporter un prix voire ( mais je n'y crois pas beaucoup ) la palme est Waltz with Bashir, un film d'animation israélien. Oui je sais j'aime l'animation mais ce film est vraiment très beau. Il raconte la quête de mémoire d'un soldat israélien ayant assisté aux massacres de Sabra et Chatila et essayant de savoir ce qu'il y faisait. L'animation n'est pas forcément fluide mais elle est compensée par un dessin à la fois violent et calme ce qui accompagne parfaitement le récit entre explications posées pour reconstruire le souvenir et rêves torturés. Ce qui est aussi extraordinaire c'est la fin qui révèle tout l'intérêt du dessin animé pour le cinéma, offre une réflexion brillante sur l'illusion et la mémoire et donne ainsi une profondeur remarquable au film. J'ai vraiment été conquise mais je ne pense pas que Cannes soit prête à sacrer une autre forme que le film traditionnel. Bien dommage parce que l'animation offre souvent des oeuvres d'une beauté et d'une profondeur aussi fortes que le cinéma "réel". Mais peut être que le super médiatique et assez rock'n roll Sean Penn va ouvrir la porte de la gloire à l'animation ?

Donc mon pronostic est que mon palmomètre n'a pas vu le film qui sera primé. Mes coups de coeurs : Skhizein, Waltz with Bashir, Tokyo Sonata, Kung-Fu Panda et Un Conte de Noël. Et la conclusion de tout est que j'adore l'animation.

2 commentaires:

Marie-Anne a dit…

Merci pour ce compte rendu tout à fait précis et détaillé... et pour ton palmomètre : au moins les films en question on gagner un truc... Cela dit je suis d'accord avec toi le cinéma d'animation c'est vachement bien

Kug-Fu panda il est hors compet non ?
D'après ce que j'ai entendu depuis le début de la quinzaine les journalistes on l'air de croire que Bashir a une chance d'avoir quelque chose, on verra bien. En revanche le Despleschin j'y crois pas trop (peut-être un prix d'interprétation masculine :-) ). Il faut que je prenne le temps d'aller le voir quand même parce que si j'aime pas toujours ce réalisateur il a quand même fait Rois et Reines.

Anaïs a dit…

Je vois bien un prix d'interprétation pour un conte de noël mais à qui le donner ? tu me dira c'est la mode des prix choral depuis quelques années, ça se pourrait bien. Sinon je n'ai pas vu Rois et Reines donc pour la comparaison ça va être difficile. L'avis général est que c'est encore mieux mais bon j'en sais rien.

Je ne savais pas que Bashir avait été si bien reçu. Tant mieux parce que c'est le plus complet des films que j'ai vu. J'aime rêver à la palme, après tout Persépolis a reçu le grand prix.

Kung-Fu Panda est hors compet oui oui, même si les Ricains ont beaucoup de choses à montrer à Cannes Dreamworks ne fait pas partie de la course à la palme ^^