jeudi 22 janvier 2009

Délectable Florence

Depuis la rentrée, je me suis fait enrôlée par Marcus dans la toute fraîche chorale de l'école. Je n'étais pas des plus enthousiaste, souhaitant réserver mon immense talent vocal pour mon pommeau de douche et mes serviettes de toilette. Et puis j'y suis allée. J'ai respiré profondément, fait tourner mes épaules et trouvé ma position verticale de sécurité. La honte prévue ne fût pas au rendez-vous, je me suis fondue dans la masse hétérogène et je me suis amusée à faire ce que je n'avais jamais fait avant.
Mais bon, la timidité dans ces cas là n'est pas chose aisée à surmonter. La peur de la fausse note, du trop aigu ou trop instable, le manque d'assurance . . . Je n'arrive pas encore à faire émerger la Callas qui est en moi (dixit Marcus). Et c'est là que Florence Jenkins intervient.

Notre bien-aimé chef de choeur, master du piano et de la voix profonde nous a gentiment suggéré de laisser notre oreille traîner près d'un morceau de la soprano américaine afin de constater toute l'étendue et la majesté de nos capacités vocales. Et ça marche.

Florence Jenkins était une brave dame de la riche société de la côte est qui se passionna très tôt pour la musique. Elle n'avait pas le sens du rythme, ni de la note juste et était incapable de tenir  quelque chose de manière à peu près correcte. Mais elle était riche, très riche ce qui lui donna la possibilité de se consacrer entièrement au beau métier de la scène auquel elle se croyait fermement destinée. Elle mit sa fortune dedans, fondant des clubs de musique et organisant des récitals afin de montrer au monde son talent. Malgré les rires et les critiques elle continua, affirmant même qu'elle était du niveau des plus grandes soprani de l'époque et que tout cela n'était que jalousie. Ma pauvre Florence, je suis désolée de te contredire, mais même l'insignifiante ignare musicale que je suis peux déceler à quel point tu es mauvaise. Pire que mauvaise, tu te situes en dehors des limite de l'art vocal, tu les dépasses en les faisant exploser, tu fais passer un concerto de casseroles pour une fugue mozartienne et mes beuglements sous la douche pour un récital de Natalie Dessay.
En même temps j'admire ta persévérance qui a d'une certaine manière l'innocence de l'amateurisme. Ton acharnement prouve la ténacité de ton amour pour la musique et comme tous les amateurs qui n'atteignent  jamais le niveau, ton dévouement à ton art t'honore. Un peu comme Ed Wood, le plus mauvais cinéaste de l'histoire (officiel) qui dans tout ce qu'il a de mauvais, montre aussi tout ce qu'il y a de touchant dans l'art des passionnés dont le seul talent est d'aimer leur art.

2 commentaires:

Wolowizzard a dit…

Merci beaucoup pour cet article! Par curiosité, je suis allée écouter un morceau de cette Florence Jenkins et je suis tombée sur un massacre absolu de l'Air de la Reine de la Nuit! C'est d'autant pire que je connais bien l'air. Mais je me suis payée une franche rigolade.

Cameuh a dit…

Ce qui est très drôle aussi sur cet air c'est d'écouter le pianiste galérer pour coller au sens su rythme très personnel de la "cantatrice" et moduler pour que ca sonne pas trop faux! Un grand moment!